À Fort McMurray, 2000 propriétaires attendent toujours leurs clés
Les logements en construction dans le quartier Abasand, à Fort McMurray.
Photo : Radio-Canada / François Joly
Prenez note que cet article publié en 2018 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Deux ans après le passage de « la Bête », le surnom donné au feu de forêt dantesque qui a ravagé une partie de Fort McMurray, en Alberta, environ 2000 propriétaires attendent toujours de pouvoir regagner leur domicile.
Un texte de François Joly
Que ce soit en raison de conflits entre propriétaires et assureurs ou du manque de main-d'oeuvre pour la construction résidentielle, de nombreux résidents de Fort McMurray ignorent toujours quand leur maison sera reconstruite.
Le 3 mai 2018 marque en effet le deuxième anniversaire du jour où les flammes ont atteint les limites de la ville.
Pour l’enseignante Caroline Boudreault, le quartier Abasand, qu'elle habite depuis 20 ans, n’a plus le même attrait depuis le passage du feu. « Ce n’est plus du tout le quartier que c’était auparavant. Je faisais beaucoup d’activités dans la forêt avec mes élèves, raconte-t-elle. Maintenant, ce n’est plus une forêt : c’est une lisière d’arbres brûlés. »
Aux problèmes du quartier s’ajoute la reconstruction de sa copropriété, qui tarde à se faire. Elle devait être terminée en février 2017. On lui promet maintenant les clés pour novembre 2018.
Caroline Boudreault observe la reconstruction de son quartier.
Photo : Radio-Canada / François Joly
L’association des copropriétaires dont elle fait partie poursuit le premier entrepreneur engagé pour reconstruire les 214 logements. La copropriété de Caroline Boudreault n’est pour l’instant qu’une charpente de bois. Elle dit maintenant se méfier quand on lui annonce une date pour la fin des travaux.
« Je suis pas mal échaudée, dit-elle. Plusieurs fois, on s’est fait donner des dates par des constructeurs, pour finalement se faire dire que ce serait six mois de plus. Je vais le croire quand ce sera terminé pour vrai. »
La zone tampon qui sépare maintenant le quartier Abasand de la forêt.
Photo : Radio-Canada / François Joly
Seulement 20 % de logements reconstruits
Caroline est loin d’être la seule à devoir s’armer de patience. Seulement 20 % des 2578 logements détruits par les flammes sont aujourd’hui de nouveau habitables, selon la Municipalité régionale de Wood Buffalo.
Dans certains cas, les retards sont causés par des conflits avec les compagnies d’assurance. Plusieurs bureaux d’avocats de Fort McMurray ont reçu des centaines d’appels de résidents qui demandaient des conseils afin d’obtenir un remboursement adéquat.
La maison de Sandra Legacy devrait être complétée en juin.
Photo : Radio-Canada / François Joly
En octobre 2017, 10 % des 27 000 réclamations faites après le désastre n’avaient pas encore été réglées, selon des données du Bureau d'assurance du Canada. Le bureau ne dispose pas de statistiques plus récentes.
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Le manque de main-d’oeuvre est également un frein à la reconstruction, croit Sandra Legacy, une autre résidente du quartier Abasand, dont la maison devrait bientôt être reconstruite.
« Des plombiers ou des électriciens, ils ne sont pas tellement payés pour travailler sur un chantier résidentiel, explique-t-elle. Si on peut faire plus d’argent en allant travailler dans une usine, on ne va pas aller travailler sur un chantier résidentiel ».
Pour Sandra Legacy, emménager dans sa nouvelle maison sera la fin d'un parcours difficile.
Photo : Radio-Canada / François Joly
Sandra Legacy s'estime tout de même chanceuse. Les travaux de reconstruction de sa maison devraient se terminer d’ici quelques semaines.
Elle a hâte de tourner la page, d’autant plus que depuis plusieurs mois, son assureur ne rembourse plus les 3850 $ qu’elle doit dépenser chaque mois pour payer la maison qu’elle loue avec son mari pendant les travaux. À ce montant s’ajoute l’hypothèque sur la maison en construction. Le prochain déménagement sera pour elle la fin d’un parcours difficile.
« Je crois qu’on le mérite, avec tout ce à travers quoi on est passé, croit-elle. Le 3 mai va toujours être une journée où on prendra une minute ou deux pour réfléchir à combien on est chanceux d’être encore ici pour parler de ce qui est arrivé. »