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Les Reines et l’avenir du football féminin junior au Québec

Des joueurs de football rassemblés pendant un entraînement

Regina (no 29) met sa carrière sur pause, parce qu'il n'y a pas d'équipe de football féminin junior à laquelle elle pourrait se joindre

Photo : Famille de Regina

Radio-Canada

Actuellement, une jeune fille qui désire jouer au football au Québec n’a d’autre choix que de le faire dans une équipe masculine, signe que le football féminin tarde à se développer. Mettre sur pied des ligues pour les femmes et les jeunes filles, voilà la mission du collectif Les Reines Football.

Un texte d'Ophélia Poisson-Vecchio

Établies depuis l’automne 2020, Les Reines souhaitent offrir aux jeunes footballeuses une chance égale à celle des garçons.

À partir de 15 ans, les disparités physiques entre les garçons et les filles deviennent trop importantes. Plusieurs filles doivent alors abandonner le football puisqu’il n’existe pas d’équipe de football féminin junior.

C’est le cas de Regina, 15 ans. Elle est passionnée par son sport et joue avec les garçons depuis quatre ans comme receveuse éloignée. Cet été, au moment où ses coéquipiers passeront au niveau midget, elle ne pourra les suivre.

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Plusieurs personnes de dos, les mains en l'air, célèbrent un jeu de football à la télévision.

Ma mère ne trouvait pas ça sécuritaire et mes entraîneurs non plus, parce qu’ils sont trop gros et trop forts. Donc, s’il existait une équipe de filles, ça m'intéresserait à 100 %, je pourrais suivre mon rêve d’être dans une équipe de football américain avec des filles, explique-t-elle.

Regina devra attendre trois ans avant de recommencer à jouer, cette fois avec des femmes au niveau senior. C’est frustrant parce que je vois que mes amis et mes coéquipiers vont aller au prochain niveau et je me dis : "Je pourrais être là." J’aimerais aller au prochain niveau, j’ai travaillé aussi fort qu’eux. J’ai été là à toutes les pratiques, mais je dois l’accepter, dit-elle, résignée.

Le développement du football féminin au Québec a pris beaucoup de retard comparativement aux autres provinces canadiennes. Ce projet est maintenant au cœur des priorités de Football Québec.

Il n’y a aucune raison qu’une femme au Québec ne puisse pas jouer au football. Présentement, si les femmes ne peuvent pas jouer, c’est parce qu’il n’y a pas de ligue. À partir de là, allons voir qui a de l’intérêt et à partir de cet intérêt, commençons à créer des clubs, explique Mathieu Joyal, directeur général de la fédération.

Assurer l’avenir des jeunes joueuses

Pour le moment, l’objectif principal des Reines est la création d’une ligue senior au Québec. Mais la fondatrice Andréanne Dupont-Parent ne s’en cache pas : l’avenir du football féminin dépend tout autant du développement au niveau junior.

À plus long terme, la stratégie serait de développer des clubs satellites juniors en utilisant les joueuses seniors qui seraient intéressées à coacher également, ajoute-t-elle.

Une ligue junior donnerait la chance aux jeunes filles qui quittent les équipes masculines de poursuivre leur carrière. Jouer conjointement avec les équipes seniors leur permettrait aussi de se préparer pour ce prochain niveau.

La centralisation des ressources permettrait aux Reines, pendant les premières années, d’offrir des camps d'initiation ou de perfectionnement aux jeunes filles. Dans un monde idéal, des tournois, des matchs préparatoires ou de démonstration seraient aussi organisés.

Regina espère qu’une ligue sera créée pour que les prochaines générations n’aient pas à mettre leur carrière sur pause comme elle a dû le faire. Maintenant, les jeunes filles qui veulent jouer au football américain sont limitées et elles le savent. Alors que s’il y avait une ligue de filles, elles pourraient se dire : "Okay, j’ai le droit de faire ce que je veux faire et j’ai le droit de jouer", affirme-t-elle.

Pour les trois prochaines années, Regina compte continuer à se préparer pour passer au niveau supérieur. Son rêve est de jouer pour le Blitz de Montréal. De me dire : "J’ai été capable, j’ai fait tout mon parcours pour me rendre au Blitz." Et d’y arriver, ce serait la meilleure chose.

Pour l’instant, le Blitz de Montréal est la seule équipe de football féminin au Québec, mais n'appartient à aucune ligue. Elle existe depuis 2001 et faisait autrefois partie d'un circuit américain. L’équipe composée d’athlètes de 18 ans et plus attend avec impatience la création d’une ligue féminine dans la province.

Football pour tous

Selon Andréanne Dupont-Parent, un défi majeur à la création d’une ligue junior est de joindre les athlètes. Selon elle, de l'intérêt, il y en a. Mais le plus difficile, c’est d’entrer en contact avec ces jeunes filles.

La fondatrice des Reines fait partie de l’organisation du Blitz et c’est souvent cette équipe qui reçoit les messages d’intérêt.

J’ai reçu des messages de parents qui cherchent à garder leurs filles dans le sport et qui disent : "Elles n’ont pas leur place dans les équipes masculines. Elles sont un peu démotivées, mais je ne veux pas qu’elles lâchent. Quelles sont leurs options?" Et ça, c’est juste des gens qui ont trouvé le Blitz de Montréal, donc je crois qu’il y en a d'autres, mentionne-t-elle.

Selon Football Québec, en 2019, 198 filles jouaient dans une équipe masculine au niveau civil. Elles représentaient 4,4 % des joueurs.

Mathieu Joyal croit fermement en ce projet. Ce qu’il souhaite, c’est le football pour tous.

Selon lui, l’ouverture d’esprit sera la clé de son éventuel succès.

Ça va prendre l'ouverture de tout le monde, des municipalités qui doivent comprendre que c’est tout aussi important que les autres équipes. Ça va prendre l’ouverture de la société et ça va prendre aussi l’ouverture des parents qui vont dire : "Oui, j’accepte que ma fille aille jouer au football parce que c’est bon pour elle."

La sensibilisation à faire auprès des parents représente aussi un grand défi pour Andréanne Dupont-Parent. Elle souhaite montrer que le football est un sport sécuritaire et bien encadré.

S’affirmer grâce au football

Pour Andréanne Dupont-Parent, la création d’une ligue junior féminine est essentielle. Selon elle, l’âge critique pour le décrochage sportif des adolescents se situe de 15 à 17 ans. Ce décrochage est plus fort parmi les filles dans les équipes masculines.

Elle ajoute que pour les jeunes filles, les bénéfices liés à la pratique du football sont indéniables.

L’estime de soi, l’affirmation, le leadership, le travail d’équipe, la résolution de problèmes, faire preuve de résilience, dit-elle. Ce sont toutes des qualités liées au football. Et si elles y sont exposées jeunes dans un contexte sécuritaire et inclusif, cela permet aux jeunes filles de poursuivre leur carrière en football, mais aussi de les appliquer dans d’autres sphères de leur vie.

Regina affirme que de jouer au football avec des garçons lui a permis de forger son caractère. Mais selon elle, la création d’une ligue féminine amplifierait le sentiment d’appartenance à son équipe.

Si tu es avec un groupe de filles, tu te comprends plus. Une équipe de femmes, c’est complètement différent parce que tu te dis : "Elles sont comme moi, je ne dois plus me prouver comme avec les garçons, je peux être au même niveau qu’elles. Je peux être là, je suis capable, je suis une fille sur le terrain et je n’ai plus à en être gênée", conclut-elle.

Elle regarde la caméra, les mains sur des casques

Regina, 15 ans, prend une pause du football

Photo : Famille de Regina

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