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Représentation électorale : les écarts recensés par le DGEQ se creusent

Le siège d'Élections Québec et de la Commission, à Québec.

Le processus de révision de la carte électorale est placé sous la responsabilité de la Commission de la représentation électorale, un organisme indépendant lié à Élections Québec.

Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel

Les tendances démographiques identifiées en avril 2023 par la Commission de la représentation électorale (CRÉ) du Québec se sont accentuées dans la dernière année, avec pour résultat qu'un vote dans certaines circonscriptions aura encore plus de poids qu'ailleurs aux élections de 2026.

C'est du moins ce que laissent croire de nouvelles données obtenues par Radio-Canada, qui a pu comparer l'évolution du nombre d'électeurs dans chaque comté au cours des 12 derniers mois.

En se basant sur la Liste électorale permanente (LEP) du 30 avril 2023, la CRÉ – présidée par le directeur général des élections du Québec (DGEQ), Jean-François Blanchet – avait prévenu dans son rapport préliminaire de l'automne que six circonscriptions comportaient trop d'électeurs, et que huit autres n'en comptaient pas assez.

Or, les chiffres de la LEP du 30 avril 2024 obtenus par Radio-Canada indiquent que la situation, loin de s'être résorbée, a empiré. Dans presque tous les cas, l'écart entre le nombre d'électeurs et la moyenne s'est creusé, s'éloignant davantage de la limite de 25 % fixée par la loi.

Des 14 circonscriptions « en situation d'exception », toutes ont vu cet écart grandir, à l'exception d'Ungava, dans le Nord-du-Québec, où il s'est très légèrement amoindri. Du lot, seul le comté des Îles-de-la-Madeleine, beaucoup moins populeux que les autres, est protégé par la loi.

En outre, 9 des 12 circonscriptions jugées l'an dernier « préoccupantes » en raison d'un écart supérieur à 20 % ont vu celui-ci s'amplifier. Un 13e comté, Pointe-aux-Trembles, s'est également joint au groupe.

Ces chiffres, recueillis sur une seule année, ne sont peut-être pas statistiquement significatifs, mais il est plus que probable que les tendances qu'ils illustrent se maintiennent, prévient le professeur John Zacharias.

Commissaire à la CRÉ à la fin des années 2000, M. Zacharias, qui est aujourd'hui titulaire d'une chaire en études urbaines de l'Université de Pékin, dit craindre que le nombre de comtés « en situation d'exception » continue d'augmenter, d'autant plus que Québec a récemment reporté le processus de révision de la carte électorale.

La question c'est : est-ce que ces exceptions deviendront la règle plutôt que l'exception?

Une citation de John Zacharias, ancien commissaire à la représentation électorale

La situation actuelle, explique M. Zacharias, est le résultat de la concentration du pouvoir économique dans les grands centres aux dépens du développement régional qui, lui, éprouve des difficultés.

Dans un système néo-libéral comme le nôtre, c'est très difficile d'avoir un développement très égal à travers le territoire, souligne-t-il.

De fait, les écarts observés en 2023 se sont également creusés au niveau régional – une situation à laquelle la CRÉ proposait de remédier avant d'être stoppé dans son élan.

Les écarts moyens négatifs se sont creusés en Abitibi-Témiscamingue, sur la Côte-Nord et au Saguenay–Lac-Saint-Jean, mais également sur l'île de Montréal et dans la région Bas-Saint-Laurent–Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine, où les commissaires proposaient de retirer deux circonscriptions.

De même, les écarts moyens positifs se sont notamment accentués en Estrie–Centre-du-Québec et dans les Laurentides–Lanaudière, où la CRÉ souhaitait ajouter deux comtés.

Les quatre formations politiques représentées à l'Assemblée nationale – la Coalition avenir Québec (CAQ), le Parti libéral du Québec (PLQ), Québec solidaire (QS) et le Parti québécois (PQ) – se sont entendues le 28 mars dernier pour suspendre le processus de redécoupage entamé par la CRÉ, un organisme indépendant.

Le ministre responsable des Institutions démocratiques, Jean-François Roberge, a justifié cette intervention politique en expliquant qu'il s'agissait d'une mesure exceptionnelle mais nécessaire pour que les régions du Québec continuent d'être bien représentées à l'Assemblée nationale.

Le projet de loi découlant de cette entente – que le Parti conservateur du Québec (PCQ) a dénoncé – a été adopté jeudi dernier dans l'indifférence générale.

Il stipule que la carte électorale actuelle, qui repose sur des données démographiques de 2014, soit utilisée lors des prochaines élections, qui auront lieu à l'automne 2026, et qu'une nouvelle carte soit établie lors de la prochaine législature en vue du scrutin suivant.

Le ministre Roberge entouré des députés Pascal Bérubé, Monsef Derraji et Sol Zanetti.

Le ministre responsable des Institutions démocratiques, Jean-François Roberge, a accepté la demande des partis d'opposition de reporter la réforme de la carte électorale. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel

L'accord conclu entre la CAQ, le PLQ, QS et le PQ prévoit par ailleurs le dépôt d'un second projet de loi, qui proposera de revoir les paramètres devant être pris en compte par la CRÉ, mais on ne sait pas encore quand exactement cette pièce législative sera déposée. Ni ce qu'elle contiendra.

Le PLQ et QS aimeraient par exemple que les comtés du Québec soient redécoupés en fonction de la population en général, ce qui inclut les personnes mineures, les résidents permanents et les immigrants temporaires, et non pas en fonction des électeurs, comme c'est le cas actuellement – une situation qui dessert l'île de Montréal.

En attendant, le poids électoral de chaque circonscription sera maintenu, pour le meilleur et pour le pire.

En moyenne, un vote dans un comté où l'écart négatif est supérieur à 25 %, comme Gaspé ou René-Lévesque, compte deux fois plus que dans une circonscription où l'écart positif est supérieur à 25 %, comme Brome-Missisquoi ou Richmond – et ce, même si l'on exclut les Îles-de-la-Madeleine du calcul.

C'est inquiétant pour la représentativité, pour le poids du vote qui, finalement, se retrouve à ne pas être égal partout comme on le voudrait, résume le professeur Zacharias.

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